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Syndicat CGT  AUTO INERGY DIVISION Groupe Plastic Omnium

Syndicat CGT / AUTO INERGY DIVISION / Groupe Plastic Omnium

Pénibilité. Prévenir Et réparer...........

Pénibilité. Prévenir Et réparer...........

Pénibilité. Prévenir Et réparer

Les faits. Le projet de loi « garantissant l’avenir et la justice du système de retraites » comporte un ensemble de dispositions concernant la pénibilité du travail, en particulier la création du « compte personnel de prévention de la pénibilité ».

Le contexte. Le mal-travail touche de plus en plus de salariés, entraînant souvent une altération de leur santé et une baisse de leur espérance de vie.

Les enjeux. Au-delà de la nécessaire « réparation » de la pénibilité, qui n’agit pas sur ses causes, un véritable renversement de perspective concernant le travail, son sens et sa place dans nos vies est nécessaire. Dès maintenant.

1. La pénibilité du travail, état des lieux

Le projet d’accord élaboré par la CGT en 2005 lors des négociations interprofessionnelles avait défini la pénibilité en ces termes : « exposition à des situations et des conditions de travail de nature à entraîner une usure prématurée et irréversible de la santé, mise en évidence au travers d’une espérance de vie en bonne santé diminuée ou d’une atteinte à l’intégrité physique ou morale ».

Elle est indissociable de la santé au travail et dépend en grande partie des conditions dans lesquelles le salarié effectue ses tâches. Les conséquences peuvent être immédiates, avec le déclenchement d’une maladie en lien avec la profession ou la survenue d’un accident du travail, mais elles peuvent également se manifester par une pathologie qui apparaît plusieurs années après avoir exercé une profession.

L’exposition durable à la pénibilité est le sort de 35 % des salariés, selon l’enquête Santé et itinéraire professionnel, réalisée en 2007 et rendue publique par la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares). Les ouvriers sont les plus touchés : 58 % d’entre eux ont connu au moins une pénibilité physique pendant quinze années ou plus. Puis viennent les commerçants, les artisans et les agriculteurs, avec un taux de 43 %.

Selon un rapport de l’Institut national des études démographiques (Ined) paru en 2008 (1), en France, un homme âgé de 35 ans peut espérer vivre encore quarante-trois ans, dont vingt-huit sans incapacité ; une femme peut vivre quarante-neuf ans, dont vingt-neuf sans incapacité. Mais ce n’est qu’une moyenne générale. En réalité, un cadre de 35 ans peut espérer vivre encore quarante-sept ans, dont trente-quatre indemne de toute incapacité. Mais un ouvrier du même âge a une espérance de vie de quarante et un ans, dont vingt-quatre sans incapacité. La double peine, c’est que non seulement les ouvriers vivent moins longtemps, mais qu’en plus ils passent plus de temps que les cadres avec des incapacités et des handicaps.

On constate actuellement une augmentation des accidents vasculaires cérébraux (AVC), avec 400 000 malades chaque année pour un coût de 8,4 milliards d’euros. Les maladies cardio-vasculaires dans leur ensemble représentent 18,7 milliards d’euros. Également en hausse, les congés maladie (720 000 personnes).

Enfin, il y a 1,2 million de personnes qui touchent une pension d’invalidité. L’Inspection générale des affaires sociales (Igas) fait l’hypothèse que parmi les causes de cette détérioration de la santé publique figure en bonne place le « mal-travail », dû à l’accélération des temps, au stress, à la pénibilité en général. « Si le travail a un coût, dit Jean-François Naton, conseiller confédéral de la CGT en charge de l’activité travail-santé, président de l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), c’est qu’il est martyrisé. »

Certaines formes d’organisation du travail, comme le lean management inspiré de l’expérience de Toyota et héritier du taylorisme, ont le vent en poupe. Conçues pour atteindre le « zéro gaspillage » dans les temps de production, elles génèrent des gains de productivité importants, mais entraînent une forte dégradation des conditions de travail et une véritable souffrance chez les salariés. L’intensification du travail sans temps morts, la répétition des gestes, la diminution de la latitude décisionnelle, la perte de solidarité produisent à la fois des troubles psychosociaux et des troubles musculo-squelettiques. Un rapport du Centre d’étude de l’emploi sur les conditions de travail et la santé au travail des salariés de l’Union européenne (recherche réalisée par la Dares, ministère du Travail), a montré le lien entre les risques psychosociaux et les formes d’organisation du travail en Europe. Avec cette conclusion que plus les salariés sont réduits à l’état de robots, plus leur santé se dégrade, la palme revenant au lean management.

2. La pénibilité du travail dans le projet de loi

Le projet de loi « garantissant l’avenir et la justice du système de retraites » comporte, dans ses articles 5, 6 et 7, la mise en place d’un « compte personnel de prévention de la pénibilité ». C’est la première fois qu’un projet de loi prend en compte globalement et par principe la pénibilité au travail dans le calcul des trimestres ouvrant droit à la retraite. En effet, la loi de réforme des retraites de 2010, qui a introduit la notion de « pénibilité au travail », ne considère que l’incapacité dûment constatée du salarié avant la retraite pour permettre un départ anticipé au cas par cas.

En clair, le salarié doit avoir déclaré et obtenu la reconnaissance d’une maladie professionnelle, et si son taux d’incapacité permanente est évalué entre 10 et 20 %, il lui faut en outre prouver qu’il a été exposé pendant plusieurs années à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels et que son incapacité est directement liée à ces facteurs de risques. À lui de défendre tout seul son dossier devant une commission qui statue sur son sort.

Le Code du travail distingue trois types de risques professionnels :

  1. les contraintes physiques marquées : manutentions manuelles de charges, postures pénibles, forcées, des articulations, vibrations mécaniques ;
  2. cl’environnement physique agressif : agents chimiques dangereux, activités exercées en milieu hyperbare (pression supérieure à la pression atmosphérique), bruit et températures extrêmes ;
  3. certains rythmes de travail : le travail de nuit, en équipes successives alternantes, le travail répétitif.

Mais, avec l’actuel projet, on est encore loin du compte. En termes de réparation, et parce que la prévention n’est pas au rendez-vous.

Principale nouveauté de la réforme, le « compte personnel de prévention de la pénibilité » sera institué dans le secteur privé. Tout salarié ayant été exposé à l’un des dix critères de pénibilité pourra accumuler des points, dont les modalités d’acquisition et d’utilisation seront fixées par décret, jusqu’à un plafond fixé à 100 points.

Chaque trimestre d’exposition à un facteur de pénibilité donnera droit à un point, et à deux points en cas d’exposition à plusieurs facteurs. Les points accumulés devront être utilisés pour suivre des formations en vue d’accéder à un emploi non exposé, ou moins exposé, à des facteurs de pénibilité, ou pour passer à temps partiel tout en maintenant sa rémunération, ou encore partir plus tôt à la retraite, dans la limite de deux ans, c’est-à-dire, au mieux, à 60 ans. Un décret obligera le salarié à consacrer les vingt premiers de ses points à la formation, exception faite des salariés âgés de 52 ans au 1er janvier 2015 qui en seront dispensés.

Le compte n’est pas rétroactif, ce qui veut dire que les salariés exposés avant l’application de la loi ne bénéficieront pas de cette disposition. Il sera financé par une cotisation des employeurs du secteur privé et une cotisation additionnelle due par les employeurs dont au moins un des salariés est exposé à la pénibilité. Le coût du dispositif est estimé à 500 millions d’euros en 2020, 2,5 milliards d’euros en 2040.

Pour Jean-François Naton, c’est la prévention qui devrait être au cœur des discussions en matière de pénibilité. Or, dans le projet de loi, le terme est largement usurpé. Il se base sur la possibilité très hypothétique d’échapper à la pénibilité du travail en changeant de métier ou de tâches grâce à la formation professionnelle, ou en choisissant de travailler à temps partiel. Où est la prévention dans ce dispositif ? Dans l’éventualité de limiter les dégâts, et ce faisant, de diminuer les risques ?

S’il n’est pas question de prévention en réalité, la logique réparatrice à l’œuvre dans ce projet est pour le moins partielle. Gérard Rodriguez, conseiller confédéral (espace revendications sociales et économiques, activité retraite) explique : « Quand on parle de prévention, le gouvernement et le Medef répondent réparation et quand on parle réparation, ils invoquent la prévention. On est dans des tactiques qui consistent à éviter en permanence tout débat. » Et d’expliquer que le gouvernement ne veut pas employer le terme « réparation » car la non-rétroactivité de la loi serait alors remise en question, au moins pour les 800 000 personnes qui partent en retraite cette année, sans aucun point à faire valoir.

Le gouvernement aurait dû, au titre de la réparation justement, laisser partir tout de suite ceux et celles qui totalisent de longues années de travail pénible. Une vraie reconnaissance de la pénibilité, une vraie réparation, ce serait cela. « Il y a une situation d’urgence pour des centaines de milliers de travailleurs », enrage Jean-François Naton.

« La véritable prévention devrait consister à faire reculer les conditions de travail les plus dures, comme le travail de nuit, ajoute Gérard Rodriguez. Et dans les secteurs où on ne peut pas améliorer les conditions de travail, il faut prendre des dispositions pour diminuer les temps d’exposition des travailleurs. » Ce n’est pas là une question de formation professionnelle. Mais on ne répond réellement ni à la dimension prévention, ni à la réparation, que la CGT n’oppose pas dans la mesure où elle considère que ce sont deux réponses à un même problème, à court et à long terme.

3. Revaloriser le travail

Il faut une politique du travail, c’est-à-dire une politique qui fasse véritablement place à la prévention, pour une véritable politique de santé. À des années-lumière de la victimisation, de la plainte, il faut en finir avec le mal-travail, la perte de sens et la résignation. En commençant par ralentir : « La lutte des temps s’est installée à la pointe de la lutte des classes », écrit Jean-François Naton (2). Ralentir le rythme forcené imposé par les impératifs de rendement maximal et le flux ininterrompu des informations à traiter. Retrouver le temps de la machine à café, des espaces de partage et d’initiative.

Il faut aussi redécouvrir le travail réel et sa dimension émancipatrice, productrice de lien social, pour être en capacité de construire des revendications. Le 50e congrès a été traversé par cette dimension, et le document d’orientation en rend compte : « La sortie de crise et une amélioration durable de la situation des salarié-e-s ne pourront se réaliser que par une revalorisation du travail. Ce qui suppose sa transformation, elle-même condition de la transformation sociale à laquelle la CGT aspire. »

L’État, l’ensemble des services des ministères du Travail et de la Santé doivent être mobilisés au service d’un changement profond qu’appelle de façon urgente la progression des coûts de santé liés au stress et au mal-être au travail. Un changement qui passe par le faire et vivre ensemble.

Pénibilité. Prévenir Et réparer...........
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