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Syndicat CGT  AUTO INERGY DIVISION Groupe Plastic Omnium

Syndicat CGT / AUTO INERGY DIVISION / Groupe Plastic Omnium

En salles et entretien. Braddock, dos au mur...


En salles et entretien. Braddock, dos au mur...

 

En salles et entretien. Braddock, dos au mur

Symbole de l’effondrement d’une industrie et de la faillite d’un système, Braddock (Pennsylvanie) est une cité dévastée après la fermeture de son énorme complexe sidérurgique. Jean-Loïc Portron et Gabriella Kessler y ont été à la rencontre des « survivants » pour « Braddock, America »un film dont les mots-clefs sont la mémoire et l’engagement.

Born in the USA

 

« Ils veulent nous reprendre les droits que nos pères ont obtenu pour nous en se battant ». Cette phrase, prononcée par l’un des habitants de Braddock (Pennsylvanie), ancienne cité sidérurgique du nord-est des Etats-Unis aurait pu sortir de la bouche d’un salarié d’Arcelor Mittal, de GoodYear, de Florange, de Métaleurop et elle est présente à l’esprit de nombre d’entre nous…

 

Braddock, l’un des berceaux de l’Amérique des pionniers, lieu même où combattit Georges Washington, alors jeune officier, connut une ascension fulgurante grâce à ses aciéries dont la première fut érigée par Andrew Carnégie en 1873.

 

Un siècle plus tard, la mondialisation fit rapidement décliner cette industrie et en 1988, Braddock fut déclarée "municipalité en détresse financière". La ville a perdu depuis 90 % de ses habitants et plus d’un tiers de ses résidents y vit au-dessous du seuil de pauvreté.

 

 

Tout ce qui faisait la prospérité de la ville, que des images d’archives nous remémore, a aujourd’hui disparu ou est laissé à l’abandon. Les commerces ont fermé, des dizaines de maisons partent en lambeaux, la municipalité n’ayant pas les moyens suffisants pour les démolir, et l’hôpital a été fermé.

 

Les habitants de Braddock qui restent doivent donc se prendre en mains avec les moyens du bord et, comme ils l’ont toujours fait, il luttent pied à pied pour garder la tête hors de l’eau.

 

Nettoyer les rues, tenter de faire revivre le stade, démolir quelques maisons, occuper les plus jeunes, veiller les uns sur les autres semblent déjà des défis énormes.

 

En choisissant de tourner aux Etats-Unis, les réalisateurs français Jean-Loïc Portron et franco-américaine Gabriella Kessler montrent la faillite d’un système en pleine décadence, qui après avoir atteint des sommets s’écroûle, sacrifié sur l’autel du profit. Ils nous montrent cette aspiration à la dignité, mais aussi cet immense chagrin, mélange de colère, de sentiment d’impuissance et de regrets qui marque profondément les habitants de Braddock.

En salles le 12 mars 2014.

 

 

Entretien avec ¨les réalisateurs, Gabriella Kessler et Jean-Loïc Portron

NVO- Comment un documentariste français confirmé et une jeune étudiante en cinéma franco-américaine en viennent-ils à tourner ensemble un film sur la résistance d’une communauté à Braddock, une ville désertée par 90 % de ses habitants ?

 

 

Gabriella Kessler – Nous nous sommes rencontrés il y a dix ans sur le tournage d’un épisode de la série documentaire « Foyers de création » qui devait se tourner dans la maison du peintre Jackson Pollock…

 

Jean-Loïc Portron - …Mais nous n’avions pas les codes pour entrer dans les musées, approcher les œuvres et Gabriella nous a aidé, nous servant un peu de « fixeur », ce qui est beaucoup plus facile quand vous partagez la langue et la culture…

 

GK – C’était mon premier tournage et je lui ai demandé si c’était toujours aussi sympa ! Et puis nous partagions aussi des goûts musicaux, étant des grands amateurs du label Stax et du groupe Wilco. J’ai fait un master en documentaire à Londres et j’ai supplié Jean-Loïc de trouver un projet aux USA.

 

NVO – On parle souvent de Détroit, mais Braddock n’est pas une évidence pour un français ou une new-yorkaise…

 

JLP- Pourtant Braddock a fait New York. Les gratte-ciels n’existeraient pas sans son acier...Tout part de l’acier aux Etats-Unis : le chemin de fer, les voitures. Et Braddock est l’origine de l’empire industriel de Carnegie. Parler de Braddock, c’est parler de l’histoire ouvrière des USA.

GK- Plein de gens étaient venus à Braddock. Pour les étudiants c’est un lieu de tournage depuis que la iron belt (ceinture de fer) est devenue la rusty belt (ceinture de rouille).

 

Il n’y a plus que trois aciéries US Steel en activité, celle de Braddock est peut-être la plus grosse. Et on y produit les tuyaux pour la fracturation hydraulique (exploitation du gaz de schiste), ce qui a ramené cette aciérie au niveau de production de 1960 avec 900 sidérurgistes.

 

NVO –La ville a, depuis les années 1920, perdu 90 % de sa population avec quasiment tout son tissu industriel. Quelle ambiguité que l’aciérie continue à fonctionner pour produire du matériel qui constitue une fuite en avant consumériste et qui détruit l’environnement !

JLP – Tout le monde là-bas en est très conscient, n’oublions pas que les personnes que nous avons rencontrées sont pour la plupart des syndicalistes, leur engagement est très clair. On le voir aussi dans le film lorsqu’ils luttent contre la fermeture de l’hôpital. Il y a une vraie solidarité, devant l’adversité, on fait bloc. Qu’on soit blanc, noir, policier, syndicaliste, coiffeuse, chômeur ou retraité.

 

 

NVO- A-t-il été facile de se faire admettre par les habitants de Braddock ?

JLP – On a commencé par un groupe de syndicalistes et il s’est rapidement noué de vraies amitiés. Et puis notre duo avec Gabriella les a amusés et intrigués. Un homme et une femme, de deux générations différentes avec des physiques très opposés, on était un peu comme Laurel et Hardy…

 

GK – Pourtant tout le monde nous disait « Braddock c’est dangereux ». Mais au bout d’une semaine, on était déjà adoptés car on n’est pas venus et repartis.

 

On a pris le temps et le gens nous ont dit « Il est temps de faire ce film, après il sera trop tard ». Et je crois qu’ils ont envie de laisser une trace de leur combat.

 

JLP – ça démarre très vite, car les habitants ont vu qu’on comprenait ce qui a été perdu. Dès notre arrivée au commissariat, ça démarre. Dès que Dean, le chef de la police ouvre la bouche, ça n’est pas le discours habituel d’un stéréotype de sheriff : il nous parle de la lutte des classes ! Ici c’est une région traditionnellement à gauche, même le parti communiste y était bien implanté et la chasse aux sorcières y a été terrible. Nous parlions d’histoire ouvrière tout à l’heure et vous citiez Howard Zinn (*): la grève de Homestead qui a eu lieu près d’ici en 1892 a été aussi marquante que celle de Haymarket.

 

NVO- Vous semblerait-il possible de réaliser un sujet similaire en France où la désindustrialisation fait aussi des ravages ?

JLP – On a dit aux habitants de Braddock « ça va aussi parler de nous » et ils étaient au courant de la casse de la sidérurgie en Lorraine. D’ailleurs, la première ville où on montre le film, c’est Longwy. Je crois que pour raconter certaines histoires, parfois, il faut faire un pas de côté, quand c’est trop douloureux….

 

Propos recueillis par Dee Brooks.

 

(*) Historien auteur, entre autres de « Une histoire populaire des Etats-Unis ».

Les projections + débat en présence de Jean-Loïc Portron(sauf mention contraire)

 

Dans l’Est :

Jeudi 6 mars à 20h00 : Longwy / cinéma Utopolis

Vendredi 7 mars à 20h30 : Thionville / cinéma La Scala

Samedi 8 mars à 18h00 : Metz / cinéma Caméo

Dimanche 9 mars à 16h00 : Nancy / cinéma Caméo

Lundi 10 mars à 20h00 : Strasbourg / cinéma Le

Mardi 11 mars à 20h00 : Mulhouse / cinéma Studio Bel Air

Dans l’Ouest :

Vendredi 14 mars à 20h00 : Brest / Cinéma Les Studios

Samedi 15 mars à 20h30 : Montauban de Bretagne/Cinéma Montal                                

Dimanche 16 mars à 20h30 : Cancale/Cinéma Duguesclin                                              

Lundi 17 mars à 20h30 : Fougères/Cinéma Le Club

Dans le Sud-Ouest :

Mardi 18 mars à 20H00 : Chateaugiron / Cinéma Paradiso

Mardi 18 mars à 20H30 : Toulouse / Cinéma ABC / + débat en présence de Gabriella Kessler.

Mercredi 19 mars à 20h30 : Cesson-Sévigné / Cinéma Sévigné

Jeudi 20 mars à 20h30 : Châtillon en Vendelais / Cinéma Le Vendelais

Dans le Sud-Est :

Samedi 22 mars à 18h15 : Cran-Gevrier / Cinéma La Turbine / + débat en présence de Jean-Loïc Portron et de Gilles Perret

Dimanche 23 mars à 17h30 : Villeneuve d'Ascq / Cinéma Le Méliès / + débat en présence de Gabriella Kessler

Mardi 25 mars à 20h30 : Saint-Etienne / Cinéma Le France

Mercredi 26 mars à 20h00 : Villefranche-sur-Saône

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